La France est en état d’alerte après qu’un homme a poignardé à mort un enseignant dans une école d’Arras, ville du nord-est du pays, qui abrite d’importantes populations juives et musulmanes. Tandis que le président Emmanuel Macron l’a qualifié d’acte de « terrorisme islamiste », le pays a annoncé qu’il déploierait 7 000 militaires avec les niveaux d’alerte les plus élevés, craignant que le conflit entre Israël et le Hamas ne conduise à des incidents violents dans les capitales étrangères. En conséquence, le célèbre musée du Louvre à Paris a évacué ses visiteurs et fermé samedi suite à une « menace sécuritaire ».
Ont rapporté les autorités françaises, un homme d’une vingtaine d’années a tué le professeur de français Dominique Bernard et a grièvement blessé trois autres personnes dans l’école qu’il fréquentait, vendredi 13 octobre. L’auteur, identifié comme Mohammed Moguchkov, a été arrêté tandis que la police a affirmé qu’il avait crié la phrase arabe « Allahu akbar » (Dieu est le plus grand) pendant l’attaque. Une source policière a annoncé à l’AFP qu’il faisait partie des dix personnes détenues, dont plusieurs membres de sa famille.
Les autorités ont suggéré un lien probable avec les violences en cours au Moyen-Orient. A Paris, une porte-parole du Louvre, le plus grand musée du monde, a annoncé à l’AFP avoir « reçu un message écrit indiquant qu’il y a plusieurs un risque pour le musée et ses visiteurs ».
Le palais présidentiel de l’Élysée a annoncé que le déploiement des militaires de l’opération Sentinelle serait achevé dans la soirée du 16 octobre. Sentinelle est une opération militaire française impliquant le déploiement de militaires, de policiers et de gendarmes mis en place à la suite des attentats de janvier 2015 pour protéger certaines parties. du pays jugé sensible au terrorisme.
« Cette école a été frappée par la barbarie du terrorisme islamiste », a annoncé Macron après avoir visité l’école, ajoutant que la victime « a certainement sauvé de nombreuses vies » grâce à son courage pour bloquer l’agresseur. Il a annoncé qu’une autre tentative d’attaque dans une région proche de Paris avait été déjouée par les forces de sécurité.
Le ministère de l’Intérieur a indiqué que le président faisait référence à l’arrestation d’un homme « radicalisé » sortant d’une salle de prière dans les Yvelines, à la frontière parisienne, pour port d’arme prohibé. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a annoncé plus tard qu’il y avait « certainement un lien entre ce qui se passe au Moyen-Orient et cet incident » à Arras.
Le pays a porté son niveau de menace au maximum après que Macron a tenu une réunion de sécurité cruciale vendredi 13 octobre après l’attentat d’Arras, tandis que le procureur national antiterroriste a annoncé l’ouverture d’une enquête.
Les autorités françaises ont en outre déclaré que Mogoutchkov était russe, né dans la république d’Ingouchie, à majorité musulmane, du Caucase du Nord. Il figurait déjà sur un registre national français comme menace potentielle pour la sécurité, a indiqué à l’AFP une source policière, et était sous surveillance électronique et physique par la DGSI, l’agence de renseignement intérieure française.
« Le terrorisme a frappé »
Bernard a été poignardé à la gorge et à la poitrine. Parmi les blessés figurent un agent de sécurité de l’école, qui a été poignardé à multiples reprises et qui se bat pour sa vie, de même qu’un enseignant dans un état moins grave. Un nettoyeur a aussi été blessé, a rapporté le procureur antiterroriste Jean-François Ricard. Aucun élève de l’école n’a été blessé.
Les écoliers de toute la France observeront une minute de silence le 16 octobre. L’attaque intervient près de trois ans jour pour jour après la décapitation de l’enseignant Samuel Paty près de son école en banlieue parisienne le 16 octobre 2020.
La police a indiqué que le frère de Mogoutchkov, âgé de 17 ans, avait été arrêté à proximité d’une autre école.
Panique à l’école
Les élèves et les enseignants ont été confinés dans l’enceinte de l’école avant d’être autorisés à sortir dans l’après-midi. Martin Dousseau, professeur de philosophie témoin de l’attaque, a évoqué un moment de panique pendant la récréation, quand des écoliers se sont retrouvés nez à nez avec l’homme armé.
« Il s’en est pris au personnel de la cantine. J’ai voulu descendre pour intervenir, il s’est tourné vers moi, m’a poursuivi et m’a demandé si j’étais professeur d’histoire-géographie », a annoncé Dousseau. « Nous nous sommes barricadés, puis la police est arrivée et l’a immobilisé. »
Samedi, l’école était ouverte aux élèves pour qu’ils puissent parler de la tragédie de la veille. «Je ressens de la tristesse et de la colère», raconte Victoire, une élève de 17 ans en dernière année de Bernard. « Il a toujours été là pour nous, c’était vraiment une personne extraordinaire. »
La France a subi une série d’attentats perpétrés par des extrémistes islamistes depuis 2015, notamment des attentats suicides et des attentats à l’arme en novembre 2015 revendiqués par l’EI contre des cibles à Paris, où 130 personnes ont été tuées. Il y a eu une relative accalmie ces dernières années, même si les responsables ont prévenu que la menace persistait.
Une protection renforcée
Dans un discours à la nation le 12 octobre, Macron a annoncé que 582 établissements religieux et culturels en France bénéficiaient d’une protection policière renforcée après l’attaque du Hamas contre Israël. S’exprimant à Arras, il a réaffirmé le message qu’il avait prononcé pendant ce discours, demandant aux Français de « se tenir côte à côte » et de « rester unis ».
Le jour même du discours du dirigeant à la nation, Darmanin a interdit jusqu’à nouvel ordre les troubles pro-palestiniennes en France, au motif qu’elles sont « susceptibles de générer des troubles à l’ordre public ». Au mépris de son ordre, des centaines de personnes se sont rassemblées le même jour à Paris et dans d’autres villes françaises en scandant des slogans pro-palestiniens et anti-israéliens.
La police parisienne a utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants et a annoncé avoir arrêté 10 des quelque 3 000 personnes présentes.
Le Louvre va rembourser les billets
Le musée du Louvre a évacué tous les visiteurs et le personnel et a fermé ses portes tôt dans la journée après avoir reçu une menace écrite. Il a annoncé que cette décision était liée à la décision du gouvernement de mettre la France en état d’alerte maximale, tout en promettant qu’il rembourserait les frais de billets pour ceux qui avaient réservé pour une visite samedi.
A rapporté le service communication du Louvre, personne n’a été blessé et aucun incident n’a été signalé. La police parisienne a annoncé que des vérifications étaient en cours dans le musée et que la zone avait été bouclée bien que les touristes et autres visiteurs sortaient en masse du musée.
Le Louvre, qui abrite des chefs-d’œuvre comme la Joconde, accueille entre 30 000 et 40 000 visiteurs par jour.
(Avec les participations de l’agence)